Optigestion - Edito - Janvier 2021 Jacques_DE_PANIS_PASIS

Perte de repères

Par Jacques DE PANISSE

Président du Directoire, Gérant et Associé

2021 débute et le virus est toujours actif. Malgré les bénéfices qu’on peut raisonnablement attendre d’une courbe d’expérience acquise à l’échelle de la planète, sur une durée d’un an, une troisième phase de contamination s’empare de nombreux pays et révèle notre grande difficulté à maîtriser une situation sanitaire qui demeure imprévisible.

Depuis plusieurs années les banques centrales ont opté pour une fuite en avant inévitable. La Corona virus disease, la Covid, les a conduites à poursuivre les achats massifs de dettes d’Etat afin de faire baisser le taux des emprunts.

Ces interventions ont permis aux gouvernements de se financer à des taux très bas, voire négatifs en Europe, et de payer le chômage partiel, les aides sociales et les plans de relance. Mais les effets de cette monétisation à grande échelle demeurent pour partie fortuits. Les instances économiques luttent contre le risque déflationniste mais l’inflation des prix des biens réels (bourses, immobilier ...) est déjà à l’œuvre.

La valeur des actifs devient difficile à établir avec des taux très bas. La valeur théorique d’une action est estimée à partir de l’actualisation des cash-flows futurs. Le taux d’actualisation est essentiel dans le calcul. Proche de zéro l’effet de levier est immense. A zéro, la valeur est théoriquement infinie. Quel taux retenir dès lors qu’on sait que les taux actuels sont certes artificiels mais calés à de tels niveaux pour plusieurs années ?

Les conséquences d’un accroissement considérable du déficit budgétaire et de la dette d’Etat sont sans doute supportables dès lors que la croissance redémarre en 2021 et se poursuit les années suivantes. En revanche, si la situation dégradée se prolonge ou si la croissance se montre durablement affaiblie, l’approbation des marchés obligataires est plus incertaine.
Dans tous les pays développés, le confinement a incité de nombreux épargnants à rejoindre les marchés boursiers. En France, plus de 400 000 nouveaux arrivants ont choisi d’acheter des actions cotées en 2020. Le comportement de ces intervenants est moutonnier et ne s’encombre pas d’analyse financière. Le manque d’expérience risque d’entraîner des courants de ventes incontrôlés en cas de dégradation imprévue et brutale de la situation économique.

Les vaccins atténuent les symptômes sans immuniser contre le virus. De plus, le virus semble muter d’autant plus vite que les organismes qu’il contamine se défendent. Certains scientifiques craignent de ce fait de nombreuses mutations associées à une efficacité déclinante des vaccins. Il est certain que l’amélioration de la situation économique serait alors plus lente que prévue !

L’élection du Président Biden et de la majorité démocrate au Congrès va permettre une généreuse politique keynésienne pour relancer l’économie. Les moyens déployés devraient permettre une reprise conséquente qui se traduira par des pressions inflationnistes inévitables, au moins dans le secteur des matières premières. Les ténors de Wall Street s’inquiètent d’une possible réaction de la FED. Nous pensons que les banques centrales percevront l’inflation comme une alliée susceptible d’aider à éponger la dette souveraine et non pas comme un risque majeur à neutraliser d’urgence. En revanche, gérer les effets d’une accélération soudaine de la vitesse de circulation des liquidités pléthoriques dans les circuits économiques pourrait s’avérer périlleux.

A l’annonce des vaccins les marchés ont décidé que les difficultés seraient réglées dans les 6 mois. De telles anticipations pourraient être déçues. De plus, pour des hypothèses de résultats des entreprises européennes en 2021 qui ne s’améliorent plus et demeurent en moyenne 12% inférieures aux performances réalisées en 2019, les investisseurs acceptent de payer aujourd’hui 20% de plus qu’il y a 1 an.

De toute évidence la perte de repères est ce qui caractérise le mieux ce début d’année 2021, notamment sur les marchés financiers. Néanmoins, la levée des grandes incertitudes de 2020, Brexit, élections américaines, tensions avec la Chine, mise en œuvre des plans de relance, constituent selon nous, des catalyseurs favorables aux marchés d’actions.

 

Rédigé le 12 janvier 2021

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