Optigestion - Edito - Décembre 2020 JDPP_02-07-18_2_Recadre_4bb8b

Les liquidités font des miracles !

Par Jacques DE PANISSE

Président du Directoire, Gérant et Associé

Le 9 novembre, alors que l’élection du Président Biden est à peine confirmée, Pfizer et BioNTech annoncent la mise au point d’un vaccin contre la Covid 19 avec une efficacité de 90%. Les marchés financiers accueillent la nouvelle avec enthousiasme et s’emballent.

En France, le CAC 40 progresse de 18% en sept séances.

Les secteurs étroitement liés au cycle économique comme les banques, les assurances, les matières premières, le tourisme ... qui avaient enregistré de pitoyables performances depuis les plus bas de mars, bondissent avec une vigueur inouïe. En revanche, le compartiment des valeurs de croissance qui avait été moins affecté, voire favorisé, par le confinement, ne participe guère au mouvement.

Les grands institutionnels ont à peine le temps de se réunir et d’envisager des arbitrages que la hausse est déjà bien engagée.
Que penser de cette réaction des marchés financiers ? La progression va-t-elle se poursuivre ? Faut-il acquérir ces sociétés cycliques ?L’annonce du 9 novembre n’aurait dû surprendre personne. Le degré d’avancement des recherches était largement connu. Ce n’est pas l’imminence d’une forte reprise fondée sur la diffusion de vaccins efficaces qui justifie l’exubérance récente des marchés. C’est, plus simplement, la pléthore de liquidités dans le système, liée aux interventions massives des banques centrales. Les pressions sur la demande d’actions devraient se maintenir tant qu’une reprise économique ne sera pas solidement enclenchée.

La validation d’un vaccin est suivie d’une phase de production des doses requises puis d’une phase assez longue de vaccination des populations. L’un dans l’autre, il parait raisonnable de ne pas espérer d’effet tangible des vaccins avant l’été ou l’automne 2021. Entre temps un nouveau confinement à la fin de l’hiver est envisagé par certains professionnels de la santé. Aux Etats-Unis, les contaminations ne cessent de progresser. Seule la Chine et quelques pays d’Asie du Sud-Est ont éradiqué le virus et bénéficient d’une forte reprise.
L’observation des faits et la prise en compte d’hypothèses plausibles devraient éveiller une relative réserve. La situation sanitaire n’est pas encore maîtrisée et chaque nouveau ralentissement imposé entraîne des dégâts plus profonds. Activité ralentie, consommation réduite, baisse des marges, endettement accru, trésorerie mise à l’épreuve, investissements reportés, hausse du chômage, détérioration du climat social, déficits illimités, les perspectives à trois ou six mois ne sont guère enthousiasmantes. De ce fait, le fort rebond des cours des entreprises cycliques pourrait paraître prématuré, voire excessif.

Certes les résultats publiés au 3ème trimestre ont été meilleurs que prévus. Pourtant, le bureau indépendant d’analyse financière, Alphavalue, qui suit 459 sociétés, parmi les plus grandes capitalisations européennes, prévoit une baisse de 38% des résultats cumulés de l’échantillon en 2020, par rapport à 2019, suivie d’une hausse de 44,3% en 2021, par rapport à 2020. Ce qui signifie que l'ensemble des bénéfices de ces entreprises à la fin de 2021 sera encore 10,5% en-dessous de son niveau de fin 2019. De plus, la reprise future pourrait se trouver handicapée par un endettement considérable des Etats, des entreprises et des particuliers.

Les sociétés de croissance ont une dynamique interne toute entière dirigée vers l’essor du chiffre d’affaires et du résultat. Sous l’impulsion de leurs profits qui progressent, leur cours s’apprécie. Les sociétés cycliques sont tributaires de la qualité de leur bilan et de la reprise économique. Or, les bilans se dégradent et la conjoncture risque de ne pas se redresser avant six mois. De plus, elle devra attendre 2022 ou 2023 pour retrouver sa vitesse de croisière de 2019.

Sur la base des profits anticipés pour 2021, les valorisations s’avèrent en moyenne 25% plus élevées qu’en 2019. La puissance de la demande l’emporte sur le bien-fondé du prix, qui n’est plus qu’une résultante. L’abondance des liquidités détermine la tendance !

 

Rédigé le 3 décembre 2020

 {fastsocialshare}